Skip links
Published on: Entretiens

Pascal Bourbon, Founder & Director, BRS

Voici un essai de Extra Text

Paroles de dirigeant à l’international

Les clés d’une réussite business à l’international

Pascal Bourbon, Founder & Director, BRS

« L’Espagne : l’illusion de proximité »

Pascal Bourbon a de nombreuses activités : Conseiller du Commerce Extérieur de la France, professeur, fondateur et directeur de plusieurs sociétés en Espagne. Il nous parle aujourd’hui de l’une d’elles, fondée il y a vingt ans…

Quelques faits

2001 :  BRS — Founder & Director — Espagne
2006 : Conseiller du Commerce Extérieur de la France
2021 : Conseiller à l’Assemblée des Français à l’étranger

 

Entretien mené par Antoine Leygonie-Fialko
Dialogue ouvert 
puis séance d’Executive Coaching
selon la méthode de CO-CREATiVE Communication®

J’ai rencontré Pascal lors d’un séjour à Paris. Avec toutes ses activités, j’ai été séduit par sa disponibilité. J’ai été admiratif de voir comment il s’implique auprès des expatriés…

« Être en concurrence ou partenaires ? »

Pascal, quelle est l’activité de BRS ?

BRS est une société de mobilité internationale qui offre deux types de service : la relocation, et tout ce qui aide un expatrié à immigrer. Nos clients sont principalement des grosses entreprises qui nous confient la gestion aussi bien logistique que juridique de l’arrivée puis de l’installation de leurs cadres. J’ai co-fondé BRS en 2001 avec mon épouse. Cette dernière s’occupe de la direction opérationnelle, de la gestion client. De mon côté, je me charge de la partie finance et stratégie. Le siège est à Barcelone, où nous résidons puisque mon épouse est barcelonaise, et nous avons des bureaux à Madrid, Valence et Séville. Sur toute l’Espagne, BRS s’appuie sur une équipe d’environ 80 personnes. Cela nous permet d’offrir nos services à une soixante de clients multinationales comme Danone, L’Oréal, Bayer, SAP, Airbus, Seat… qui nous offrent du business récurrent. Au final, 95% de nos clients ne sont pas espagnols. Ce sont des groupes internationaux.

Quels sont vos concurrents ?

J’ai deux types de concurrents. D’une part, il y a des concurrents qui sont en réalité, pour nous, des apporteurs d’affaires. Je pense à toutes ces sociétés globales qui offrent des services sur l’ensemble de la planète, puis sous-traitent sur de nombreux pays. Comme l’Espagne n’est pas un très gros marché en termes de mobilité internationale, les grands opérateurs internationaux n’ont pas de filiale locale. Pour eux, nous sommes surtout un partenaire à qui ils peuvent déléguer une mission, avec une garantie de qualité.

D’autre part, nous avons deux vrais concurrents. Ce sont deux sociétés similaires qui ont été fondées il y a une vingtaine d’années par des entrepreneurs, comme nous.

Enfin, entre ces deux types, il y a aussi le cas de quelques sociétés globales qui ont un petit bureau à Madrid. Avec elles, nous sommes à la fois en concurrence sur les missions à Madrid et un partenaire sur des missions hors de la capitale.

« Accumuler les facteurs de différenciation »

Comment vous distinguez-vous de la concurrence ?

Nous avons au moins quatre facteurs de différenciation.

Notre premier facteur de différenciation est la spécialisation sur un métier et sur un pays avec le portefeuille de clients que nous avons. Certains de nos concurrents commencent à se dire « on va ouvrir le Portugal, on va ouvrir la France ou l’Italie ». Cette stratégie impose de gérer plusieurs équipes et la multiculturalité. De notre côté, nous avons fait le choix d’être les meilleurs spécialistes de l’Espagne. Nous connaissons très bien toutes les sensibilités, le marché immobilier, les pressions administratives, les écoles, les systèmes éducatifs…

Notre deuxième facteur de différenciation est notre obsession de la satisfaction du client. Je dis à mes équipes « être bon ça ne suffit pas, il faut être au moins excellent ». Pour cela, nous avons fixé notre KPI de satisfaction client à 95% alors que les concurrents se contentent habituellement de 80%.

Grâce à cette approche, nous venons de recevoir un prix international pour l’excellence de nos services. Ce prix est donné par le plus gros opérateur de mobilité internationale, une société américaine cotée sur la Bourse de New York. Elle a 450 partenaires dans le monde, et elle nous a attribué le prix le plus élevé : le « platinum ». Seulement dix sociétés dans le monde ont reçu ce type de prix. Et au fil des ans, nous avons accumulé quatorze de ces prix. Nous sommes la seule société à en avoir autant.

Notre troisième facteur de différenciation est une gestion financière très rigoureuse de façon à pouvoir proposer de l’expense management. Certaines grosses sociétés ont une direction des achats très compliquée qui rend difficile de payer les factures d’un fournisseur occasionnel qui n’est pas dans leur système. En faisant de l’expense management, nous aidons ces sociétés à fluidifier leur situation. Nous payons les-dites factures, puis nous nous les faisons rembourser ultérieurement, ce qui est possible puisque nous sommes habilités par le client et que nous avons une trésorerie suffisante.

Notre quatrième facteur de différenciation est la certification. Nous sommes certifiés ISO 9001 depuis plus de dix ans, et ISO 14001 depuis 2016. Pour moi l’environnement, c’est quelque chose d’important et j’ai tout de suite vu une opportunité. Nous répondons à beaucoup d’appels d’offre de sociétés américaines. Ces appels d’offres complexes de 40 pages sont souvent préparés par des sociétés de conseil qui demandent : « Quelle est votre politique en matière d’environnement ? Est-ce que vous avez une certification ? Envoyez-nous le certificat » Et là, grâce à nos certifications, nous accumulons des points, ce qui nous permet de gagner 60% des appels d’offre sur lesquels nous nous présentons.

« Fidéliser par la flexibilité »

Comment avez-vous constitué puis fidélisé une équipe de valeur ?

Comme nos clients ont un background international, nos employés doivent pouvoir y répondre. Pour cette raison, tous nos collaborateurs parlent au minimum l’espagnol et l’anglais, voire même trois ou quatre langues – c’est une condition nécessaire mais pas suffisante. L’autre condition est l’expérience de l’expatriation. Être allé étudier à l’étranger n’est pas suffisant pour nous. Nous voulons que nos collaborateurs aient eu l’expérience de chercher un logement, travailler, faire des papiers, et de s’être véritablement confrontés aux situations locales d’un expatrié. Plus de la moitié de nos employés sont des étrangers qui résident en Espagne depuis plusieurs années. Ce sont des personnes qui ont au moins cette double culture. Comme ce profil de personnes est nomade, nous sommes obligés de leur offrir de la flexibilité. Les deux tiers sont en contrat d’exclusivité en freelance car ils ne veulent surtout pas avoir de contrats fixes. Nous les fidélisons en étant très souples pour nous adapter à leur situation. Certains ont besoin d’avoir un revenu important chaque mois, alors nous leur confions de nombreuses missions. Pour d’autres, il s’agit seulement d’un revenu d’appoint, alors nous acceptons de leur confier seulement quelques missions par mois.

Le dernier tiers de l’équipe rassemble les salariés en back office. Cette équipe est plus difficile à gérer, avec des profils plus jeunes, sur lesquels il y a des rotations plus importantes.

Pascal, quels sont vos challenges pour les prochaines années ?

J’ai quatre challenges pour l’avenir.

Mon premier challenge est de continuer à maintenir notre niveau d’excellence avec un volume de travail beaucoup plus important. Cette année, nous avons 20% de croissance. Dans une société de services, 20% de croissance ça veut quasiment dire 20% de personnes en plus, donc il faut les recruter. Or il y a pénurie de talents en ce moment… Dans un tel contexte, maintenir notre exigence d’excellence requiert énormément d’efforts.

Mon deuxième challenge est d’intégrer de nouveaux services qui me permettraient de créer encore plus de valeur.

Mon troisième challenge est d’optimiser les process pour éviter le phénomène de fatigue des équipes, et réduire encore plus le turn over.

Mon quatrième challenge, en tant que dirigeant fondateur, est de préparer la sortie. Ma femme et moi sommes actionnaires à 100% de la société. Un jour, nous voudrons sortir, donc nous devons faire croître la société tout en consolidant les process afin que les dirigeants se désengagent un petit peu de la gestion quotidienne, et que la cession puisse s’opérer facilement avec des repreneurs.

« Pour demain, ça veut dire pour plus tard »

Si un Français s’apprête à faire du business en Espagne, quels conseils lui donneriez-vous ?

En première analyse, l’avantage de l’Espagne est sa proximité géographique, linguistique et culturelle. Pour autant, dès que l’on entre dans les détails, l’Espagne est très différente de la France.

Par exemple, la France a un système très centralisé. À l’inverse, l’Espagne a 17 communautés autonomes. Et chaque communauté autonome a ses lois, et pour certaines sa langue. Par exemple, en Catalogne, il vaut mieux parler catalan, surtout si les clients sont locaux, et encore plus s’il s’agit de l’administration locale et des marchés publics. En Galice, il y a une autre langue, au pays Basque, encore une autre, et surtout il y a des lois différentes.

Par ailleurs, les Français peuvent faire l’erreur de croire qu’ils ont une meilleure préparation ou formation que les Espagnols. C’était vrai autrefois. Mais aujourd’hui, le niveau de formation en Espagne est devenu très bon. Il y a de bonnes écoles d’ingénieur et de prestigieuses business schools. En outre, à Barcelone, 20% des habitants sont des étrangers. Ce sont souvent des Américains, des Australiens, des Allemands, des Français, des Scandinaves qui sont très qualifiés et rendent plus compétitif le marché du travail, d’autant que les salaires, hors package d’expatriés, sont très faibles.

Les Français ont souvent tendance à connaître l’Espagne pour ses plages, le soleil et la fête. Or, quand on vient y travailler, la réalité est différente. Le Français va devoir apprendre la PATIENCE. Ici, nous sommes dans une économie du Sud de l’Europe, où les délais et les engagements n’ont pas la même valeur qu’en France. Quand un Espagnol dit qu’il va faire quelque chose pour demain, il ne va pas forcément le faire d’ici demain. Le mot mañana se traduit officiellement par « demain », mais souvent il signifie seulement « plus tard ». Si un Espagnol promet de faire quelque chose pour « mañana » cela veut dire qu’il le fera dans 3-4 jours.

J’ai vu des Français repartir parce qu’ils n’en pouvaient plus. Les Espagnols sont des latins et ces Français ne supportaient plus le manque de rigueur, les décisions ou les réunions qui traînent, les délais de paiement qui s’allongent, y compris dans les grosses multinationales. Pour une PME ce n’est pas facile. D’où l’importance d’avoir une bonne trésorerie.

En contrepartie, les Espagnols ont une capacité d’IMPROVISATION bien plus développée que les Français. Face à un gros projet qui a pris du retard et dont les parties prenantes n’ont pas fait leur boulot… au dernier moment, les Espagnols trouvent toujours le moyen de retomber sur leurs pieds. Alors que pour un Français qui n’a pas l’habitude, c’est l’horreur. Il s’arrache les cheveux et peut décider, à tort, d’abandonner le projet. Pourtant, il y a de très belles boîtes espagnoles. Pour preuve, leur commerce extérieur est en meilleur situation que le nôtre.

En bref, pour réussir en Espagne, il faut être patient, aller jusqu’au bout et avoir une tolérance à l’improvisation. Avec le temps, j’ai rencontré beaucoup de cadres dirigeants envoyés en Espagne par leur société qui ont démissionné, à la fin de leur contrat d’expatriation, pour pouvoir rester en Espagne. Car pour eux, le proverbe était devenu réalité : « En Espagne on vit bien » !

Regard sur une expérience d’Executive Coaching selon la méthode CO-CREATiVE Communication®

Un mot sur votre expérience d’Executive Coaching avec moi ?

Avec vous, Antoine, faire du coaching, c’est comme faire du yoga, où quand je fais des exercices durs, je cherche la limite entre le plaisir et la douleur. Quand j’arrive à cette limite, c’est l’idéal. Cela veut dire que j’ai été loin, pas trop loin pour se faire mal mais suffisamment loin pour avoir du plaisir.

Propos recueillis par Antoine Leygonie-Fialko

ANTOINE LEYGONIE-FIALKO

International Executive Coach & Adviser

« Become an inspiring leader »

Antoine Leygonie-Fialko est International Executive Coach & Adviser, spécialisé dans l’accompagnement des dirigeants à l'international vers « une pensée Claire et Calme, Bienveillante et Puissante ».

Polytechnicien, Ingénieur des Ponts, Architecte et Docteur en Philosophie, il est fondateur de la Co-CREATiVE Communication® et de la société CADRAN qui opère mondialement. Auparavant, il a dirigé 7 sociétés, de la start-up au corporate, en France et à l’international (Europe, Eurasie, Afrique), dans diverses industries (bâtiment, internet, RH…).

Aujourd’hui, fort de plus de 3 000 heures d’Executive Coaching sur 5 continents et 40 pays, il intervient auprès de tout dirigeant à l'international qui vise un leadership d'excellence et souhaite développer toute la puissance qui sommeille en lui et ses équipes.

Mes derniers articles Me Connaître