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Published on: Entretiens

François Delattre, Directeur des opérations Europe, Louvre Hotels Group

Voici un essai de Extra Text

Paroles de dirigeant à l’international

Les clés d’une réussite business à l’international

François Delattre, Directeur des opérations Europe, Louvre Hotels Group

« La flexibilité guide l’expatrié »

François Delattre est expatrié depuis onze ans. Il a géré des équipes sur plusieurs continents, tout en vivant à cheval entre la Pologne et l’Allemagne…

Quelques faits

2011 : Louvre Hotels Group — Deputy Manager & F&B coordinator for Poland
2016 : Louvre Hotels Group — Post Acquisition Integration Manager Allemagne
2018 : Louvre Hotels Group — Director Integration Management

2021 : Louvre Hotels Group — Director of Operations Europe

Mail : francoisdelattre@hotmail.fr

Entretien mené par Antoine Leygonie-Fialko
Dialogue ouvert 
puis séance d’Executive Coaching
selon la méthode de CO-CREATiVE Communication®

François a une bonne humeur et un enthousiasme très communicatifs. J’ai adoré nos échanges et sa manière de raconter avec passion ses différentes expériences de dirigeant à l’international…

« En Pologne, le respect hiérarchique domine »

François, qu’avez-vous retenu de votre première expatriation en Pologne ?

J’ai retenu de ma première expatriation en Pologne que même si ce pays est européen, il présente un vrai changement de culture par rapport à la France. Par exemple en Pologne, les personnes sont très axées sur la hiérarchie. Elles sont extrêmement respectueuses de leur manager. Les rapports sont beaucoup plus protocolaires qu’en France. Au début, étant étranger, avec en plus un poste de management, j’ai vécu cela comme une curiosité. Je ne m’attendais pas à une telle différence. En Pologne, le respect de la hiérarchie crée une vraie distance dans la gestion du personnel. Je n’avais pas cette distance en France. Je suis d’une nature assez accessible. J’aime beaucoup interagir. Je tutoie facilement et je suis très amical. J’ai donc dû changer mon approche. Cela m’a permis de découvrir que cette distance, qui ne m’était pas naturelle, simplifiait la prise de décision.

Par ailleurs j’arrivais dans un nouveau pays dont je ne parlais pas du tout la langue. Et le polonais n’est pas une langue facile. Le début a donc été difficile. Je me suis senti très seul. Les Polonais ont beaucoup de mal à donner leur confiance et à s’ouvrir par rapport aux Français. Puis au fil du temps, je me suis rendu compte qu’une relation pouvait se construire entre nous.

Pour cela, j’ai dû gagner leur confiance. Comme notre société est française, et que je venais du siège, les Polonais m’ont pris pour un œil de l’étranger. J’étais mal perçu. Progressivement, mon acceptation s’est faite de manière naturelle. Les Polonais se sont rendu compte que j’étais là pour les aider. Une fois qu’ils ont compris que j’étais là pour travailler avec eux, pour les faire avancer, les Polonais m’ont approché de façon plus libre.

Au début ils acquiesçaient à tout, rendant difficile ma plus-value de manager : « si tout le monde dit oui tout le temps, où est l’émulation ? » Mais au bout d’un certain temps, ils ont compris, ils ont commencé à prendre la parole.

J’ai pu travailler avec eux, demander du vrai feedback. Je les ai impliqués. Je leur ai montré que leur avis était important pour moi et que je n’arrivais pas avec une idée ou une politique déjà prédéfinie, préformée.

Ces cinq ans à Varsovie ont beaucoup développé mon sens de l’écoute, mon envie d’essayer. Cette expérience m’a fait grandir en me permettant d’être moins focus et plus flexible.

« En Allemagne, j’ai appris à bien expliquer »

Vous partez alors pour l’Allemagne. Qu’y avez-vous appris ?

 Je suis parti en Allemagne pour une mission qui a duré deux ans. Cette nouvelle mission m’a confirmé le fait que chaque pays est différent, même si la France, la Pologne et l’Allemagne sont des pays européens, apparemment pas très éloignés les uns des autres. Les Allemands se distinguent des Polonais. La relation à la hiérarchie par exemple. Ils sont quand même respectueux mais pas autant… En France, il est facile d’approcher son manager ou son N+1, alors qu’en Allemagne, ce n’est pas le cas.

Les Allemands aiment bien les instructions très cadrées, les process, les choses établies. J’ai trouvé ce changement très marqué. Comme je suis arrivé dans le cadre du rachat d’une structure, je n’étais pas accueilli à bras ouverts. J’ai fait face à de nombreux questionnements et il m’a fallu beaucoup d’écoute pour vraiment comprendre ce que les Allemands attendaient et que nous puissions travailler ensemble.

Grâce à cette deuxième expatriation, j’ai affermi mes compétences et ma stature. Après avoir appris à bien écouter, j’ai appris à bien expliquer. Je partais quasiment d’une feuille blanche alors qu’en Pologne des infrastructures étaient en place. En Allemagne je suis parti de zéro, donc je faisais beaucoup de pédagogie. Les Allemands aiment bien avoir une présentation claire des objectifs.

« À l’étranger, les process ne sont pas duplicables »

Ensuite, vous revenez en Pologne pour travailler en relation avec plusieurs continents ?

Je suis revenu à Varsovie, mais avec une mission différente de mon premier séjour. Cette fois-ci ma responsabilité était internationale et multi-pays. Depuis la Pologne, j’ai travaillé avec l’Inde et avec le Brésil, pour intégrer des structures que nous avions rachetées. Pour la Pologne et l’Allemagne je m’occupais de l’intégration et de l’optimisation entre les deux pays. Je faisais tout cela en même temps.

Ce poste m’a permis de comprendre qu’un expatrié peut arriver avec tous les process qu’il veut, avec une ligne en provenance du siège, mais que s’il n’a pas compris la notion de culture, il va droit à l’échec. En effet, quand nous sommes expatriés, c’est nous qui arrivons dans le pays d’accueil, et c’est donc à nous de nous adapter. Ce n’est pas l’inverse. Certes, des compromis sont à faire des deux côtés. Mais c’est à nous, les expatriés, de nous accoutumer plus que l’autre. Car ce que nous faisons en France n’est pas duplicable tel quel dans d’autres pays.

« L’agilité pour survivre »

Maintenant vous vous êtes recentré sur la Pologne ?

 À Varsovie, à l’heure actuelle, je suis directeur des opérations pour l’Allemagne et la Pologne. Je suis là pour être sûr que les hôtels performent bien et sont en adéquation avec les process que nous avons mis en place dans l’entreprise. Louvre Hotels a différents statuts. Nous avons nos propres hôtels, nous avons des hôtels qui sont en management c’est-à-dire que nous les gérons pour le compte de tiers qui en sont propriétaires et nous avons aussi de la franchise pure.

Par ailleurs, nous opérons des hôtels du zéro au cinq étoiles, nous touchons donc à tous les segments du marché.

Dans ce contexte, il est difficile de se distinguer de la concurrence. Nous avons toute la partie conceptuelle, toute la partie offre que nous pouvons offrir au client. Une fois passés outre le design et la localisation, les services ou les expériences annexes offertes au client sont prépondérantes. Un hôtel, ce n’est pas un endroit où nous allons juste pour dormir, c’est-à-dire un lieu froid où il ne se passe rien. Nous essayons de créer une atmosphère où les personnes puissent se rencontrer et puissent échanger.

Aujourd’hui, j’ai des équipes d’environ 600 personnes pour une cinquantaine d’hôtels, parce que nous avons eu un creux avec le covid. La fidélisation et le management des équipes sont des sujets considérables, et encore plus dans notre branche. Avec le covid nous avons beaucoup souffert pendant deux ans.

Je suis très fier : à Louvre Hotels, nous n’avons pas licencié une seule personne, nous avons gardé tout le monde, même dans les pays où nous n’avons pas eu d’aides. Certes, nous n’avons pas renouvelé certains contrats mais nous n’avons pas fait de plan social.

Dans notre métier, la fidélisation est un enjeu primordial. Outre les salaires pour lesquels le marché est très dynamique, l’avantage de Louvre Hotels par rapport à d’autres groupes, c’est notre esprit de proximité avec les équipes et de promotion en interne.

En Pologne, nous intégrons autant que possible les équipes sur tous les projets. Nous ne prenons pas que les managers. À tous les membres des équipes, nous demandons des feedbacks et des idées. Cette implication de tous est une vraie plus-value pour eux. Tous les groupes hôteliers ne procèdent pas ainsi.

Toutefois, comme nos concurrents, nous vivons une crise des vocations sur tous les métiers de service ou de bouche, notamment sur l’hôtellerie et la restauration. Pour faire face à cette crise, nous multiplions les innovations. Comme les horaires ne sont pas faciles, nous revoyons nos fonctionnements, nous adaptons notre business model et nous gagnons en flexibilité. Entre le covid, le changement de génération qui commence à se voir, tout est à revoir. Avant, les gens voulaient un CDI, maintenant ils n’en veulent plus, ils veulent juste de la flexibilité. Ce changement est arrivé d’une façon extrêmement rapide. Avant nous proposions des semaines de 5 jours, et maintenant les candidats à l’embauche nous demandent d’offrir des semaines de 4 jours, avec plus de part time, des contrats à plus courte durée. Dans l’hôtellerie nous avons un système de formation qui est lourd. Par exemple un réceptionniste ne commence pas du jour au lendemain. Nous devons avoir une approche différente pour tout ce qui concerne le onboarding et le training notamment en intégrant une partie online.

Je pense que le changement profond que nous avons au niveau de notre business model, au niveau des équipes et de notre façon d’opérer n’est pas lié au pays. J’apprends l’agilité dans le business model dans cette nouvelle étape.

Cette crise que traverse aujourd’hui notre métier, je la vois se manifester sous différentes formes dans chaque pays. Cela m’apprend l’importance de toujours garder une forme d’agilité dans le business model.

« Il faut juste être curieux »

François, quels conseils donneriez-vous à un dirigeant qui arrive en Pologne ?

Pour réussir son expatriation en Pologne, la personne est obligée dès son arrivée de trouver un point d’attache. Les ambassades peuvent informer sur la présence des associations d’aide à la personne ou aux entreprises, comme le Varsovie Accueil. Pour le business en Pologne, je dirais à un dirigeant français qui arrive : « L’essentiel c’est que tu abandonnes rapidement ton prisme franco-français. En priorité, retiens que c’est à toi de t’adapter. Par exemple, ne te repose pas simplement sur le français ou sur des interprètes. Pour montrer ton respect, commence à apprendre un peu la langue du pays. Au final, tu verras, c’est assez simple, il faut juste être curieux ! »

Regard sur un cycle d’Executive Coaching selon la méthode CO-CREATiVE Communication®

Un mot sur votre expérience d’Executive Coaching avec moi ?

J’ai été surpris de la facilité avec laquelle j’ai pu échanger avec vous. En fait, je me suis senti immédiatement en confiance et cela m’a stimulé à avancer rapidement sur des sujets pourtant difficiles, parfois intimes. Une vraie plus-value !

Propos recueillis par Antoine Leygonie-Fialko.

ANTOINE LEYGONIE-FIALKO

International Executive Coach & Adviser

« Become an inspiring leader »

Antoine Leygonie-Fialko est International Executive Coach & Adviser, spécialisé dans l’accompagnement des dirigeants à l'international vers « une pensée Claire et Calme, Bienveillante et Puissante ».

Polytechnicien, Ingénieur des Ponts, Architecte et Docteur en Philosophie, il est fondateur de la Co-CREATiVE Communication® et de la société CADRAN qui opère mondialement. Auparavant, il a dirigé 7 sociétés, de la start-up au corporate, en France et à l’international (Europe, Eurasie, Afrique), dans diverses industries (bâtiment, internet, RH…).

Aujourd’hui, fort de plus de 3 000 heures d’Executive Coaching sur 5 continents et 40 pays, il intervient auprès de tout dirigeant à l'international qui vise un leadership d'excellence et souhaite développer toute la puissance qui sommeille en lui et ses équipes.

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