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Management interculturel au Mexique

Management interculturel

Mexique — Comprendre l’expression « Mi casa es tu casa”

De nombreux étrangers au Mexique sont souvent perplexes face à certaines expressions courantes telles que : « Je suis passé chez toi avant de venir », « Ta maison se trouve dans tel quartier », ou encore « Chez toi, il y a un grand jardin avec beaucoup de fleurs ».

Même si l’on est très souvent accueillis France de manière très chaleureuse, et qu’on nous invite souvent à “faire comme chez soi”, au Mexique le principe est poussé encore plus loin dans le sens que la politesse nous mène à ne jamais mentionner dans notre discours le “chez moi” ou “ma maison” et de les substituer systématiquement par “tu casa”, ta maison.

Bien sûr, il va de soi que personne ne pense réellement à réclamer les clés de cette maison qui devient soudain la nôtre. Cependant, ce genre de conversation peut choquer certaines cultures plus que d’autres. C’est ce que Erin Meyer appelle la communication contextuelle. Par exemple, lorsque nous faisons remarquer à quelqu’un qu’il est tard, cela sous-entend implicitement qu’il est temps de rentrer chez soi.

Dans une culture à contextualisation forte, la communication est plus empreinte de sous-entendus que dans une culture à contextualisation faible. Les gens y sont habitués à écouter ou lire “entre les lignes”. Ce que les japonais appellent “écouter ce que dit l’air”. Cela peut entraîner de la confusion lorsque le locuteur n’a pas l’habitude de cette pratique, tandis que les personnes qui l’écoutent, habituées à cette communication contextuelle, peuvent chercher des messages cachés là où il n’y en a pas.

Lorsque John F. Kennedy a prononcé les mots “Ich bin ein Berliner » (« Je suis un Berlinois ») lors de son célèbre discours à Berlin-Ouest pendant la guerre froide pour montrer sa solidarité avec les Berlinois, il ne pensait pas que son discours serait interprété différemment, en effet « Berliner » est également un beignet au chocolat en allemand.

Les Américains en général ont une communication très directe et explicite, à l’opposé des Japonais et des coréens. Les Français et les hispanophones sont entre les deux.

Facteurs culturels

En plus des différents niveaux de contextualisation selon les diverses cultures, il existe de nombreux facteurs culturels qui peuvent compliquer la communication et semer la confusion. 

Cet article met en lumière trois étapes essentielles pour établir une relation interculturelle épanouissante. Ensuite, nous explorerons les trois piliers fondamentaux qui permettent de construire des relations interculturelles solides en suivant ces étapes.

La confiance

La première étape cruciale consiste à établir une relation de confiance. La confiance constitue le socle de toute relation, et dans un contexte interculturel, il est primordial de ne pas sauter aux conclusions hâtives face à des malentendus culturels, qui peuvent souvent être à l’origine de divergences de perspectives et de comportements.

La confiance elle-même se construit de manière différente selon les cultures. Dans certaines cultures, elle s’établit à travers des expériences émotionnelles telles que partager un repas, participer à des événements communs ou avoir des interactions basées sur des liens personnels. Les expériences partagées, marquées par un fort niveau d’affect, sont à la base de l’établissement d’une confiance mutuelle. C’est pourquoi certains étrangers, qu’ils soient français ou américains, peuvent ne pas comprendre le besoin de leurs correspondants espagnols ou latino-américains de prendre le temps de déjeuner longuement au restaurant. Ce qui peut sembler être une perte de temps pour certains est en réalité perçu par d’autres comme un investissement nécessaire pour construire la confiance.

Dans d’autres cultures, comme la culture française, la confiance est de nature cognitive et se construit sur la base de résultats concrets. Certaines entreprises ont saisi cette différence et adaptent leurs pages internet en fonction du public ciblé. Par exemple, une multinationale qui promeut la diversité, l’équité et l’inclusion proposera des contenus différents aux États-Unis et en France. Aux États-Unis, on trouvera des photos d’événements centrés sur ces thématiques, des témoignages émouvants d’employés, ainsi qu’un message simple d’un dirigeant avec sa photo, mettant en avant l’importance de ce mouvement. En revanche, en France, la même entreprise optera pour une simple photo générique, suivie d’un texte détaillé sur le sujet, accompagné de nombreux graphiques et de données chiffrées illustrant les résultats obtenus. Il est donc essentiel de savoir adapter son message en fonction des personnes concernées.

Un autre facteur clé qui peut influencer la confiance est la ponctualité. Alors que les Français peuvent se plaindre du manque de ponctualité des Mexicains, ils sont en revanche perçus comme peu fiables par les Allemands, les Suisses et les Anglais. Cet exemple met en évidence une autre observation concernant les facteurs culturels : ceci ne sont pas valables dans l’absolu mais de manière relative, par rapport aux comportements d’autres cultures.

La ponctualité est étroitement liée à la perception du temps. Pour certains, le temps est une entité malléable, on le prend, on le perd, on le donne, on le gagne… Tandis que d’autres le perçoivent comme un flux rigide et séquentiel.

Gestion des conflits

La gestion des conflits constitue la deuxième étape majeure dans la gestion des relations interculturelles, et elle peut s’avérer complexe. Deux facteurs susceptibles d’aggraver les conflits au lieu de les résoudre sont l’influence de la hiérarchie et les différentes méthodes d’évaluation des individus.

L’impact de la hiérarchie

De nombreux étrangers sont souvent pris au dépourvu lorsqu’ils arrivent au Mexique et découvrent la coutume de répondre « mande » ou « mande usted » (donnez-moi un ordre) lorsqu’on les appelle ou qu’ils n’ont pas bien entendu un message. Jusqu’à récemment, les parents avaient pour habitude de corriger leurs enfants en leur disant : « On ne dit pas « quoi », on dis « mande », ne sois donc pas irrespectueux ».

On pense que cette expression trouve son origine à l’époque coloniale, lorsque les Espagnols ont établi un système de castes dans lequel les castes inférieures (indigènes et métis) étaient contraintes de montrer leur soumission aux castes supérieures (blancs et créoles) qui gouvernaient lors de la vice-royauté. Bien que cette expression soit devenue au fil du temps une forme de politesse, une nuance par rapport aux réponses directes telles que « quoi », elle n’en demeure pas moins une manifestation d’une attitude servile qui, heureusement, tend à disparaître.

Cette attitude nous montre tout d’abord l’impact de l’Histoire sur les valeurs actuelles d’une culture. Et dans le cas du Mexique, elle nous fait voir l’importance que la position hiérarchique d’une personne, son statut, peut avoir sur les comportements.

La hiérarchie revêt aussi une grande importance dans les cultures asiatiques telles que la japonaise ou la coréenne. Malcolm Gladwell dans son livre “outliers” souligne l’importance de la hiérarchie dans la langue coréenne qui utilise des termes honorifiques pour s’adresser aux individus en fonction de leur statut social. Cet héritage culturel a été mis en cause dans les terribles accidents d’avion de la compagnie coréenne, où il a contribué à des problèmes de communication et à une réticence à défier l’autorité dans le cockpit. 

Dans une culture où le style de leadership est fortement hiérarchique, on attend du chef qu’il adopte une approche autoritaire qui guide ses subordonnés. En revanche, dans des cultures égalitaires comme celles des pays nordiques, le rôle du manager est celui d’un facilitateur entre égaux. Les écarts hiérarchiques sont réduits et il n’est pas rare de voir la communication contourner les niveaux de hiérarchie établis.

Il est facile de comprendre les conflits qui peuvent survenir lorsqu’une approche trop égalitaire est appliquée dans une culture hiérarchique, ou vice versa. Par exemple, contourner les échelons hiérarchiques pour donner ou recevoir des instructions peut profondément offenser un manager issu d’une culture hiérarchique. En conséquence, ses subordonnés peuvent hésiter à suivre les instructions reçues directement par crainte d’offenser leur supérieur et d’en subir les conséquences.

Évaluation des personnes

Ces styles de gestion, qu’ils soient égalitaristes ou hiérarchiques, ont un impact sur la manière de fournir une évaluation à un membre de l’équipe. Dans une culture hiérarchique, le statut de la personne joue un rôle primordial dans la construction de son identité. Ainsi, toute action susceptible de remettre en question ce statut est perçue comme une atteinte à sa valeur personnelle. Alors qu’une critique directe, claire et publique ne pose aucun problème au sein d’une culture égalitariste, elle peut engendrer de la honte et faire ressentir à la personne qu’elle est dévalorisée dans les cultures hiérarchiques. Une personne ainsi confrontée sera convaincue qu’elle est sur le point d’être congédiée, ce qui pourrait l’inciter à prendre les devants et à démissionner. Il est donc crucial de faire preuve de prudence lors de la communication de retours d’information dans de tels cas, en adoptant une approche subtile, courtoise et, surtout, en privé et en toute confidentialité.

Les trois piliers de la relation interculturelle

Nous présentons cans cet article une méthode novatrice basée sur trois piliers fondamentaux pour construire des relations interculturelles épanouissantes, basées sur la confiance et non conflictuelles. En reconnaissant et en intégrant ces éléments clés dans les interactions interculturelles, il est possible de favoriser une compréhension mutuelle, une communication efficace et une collaboration fructueuse.

Ouverture d’esprit

Le premier pilier de cette méthode consiste à développer une attitude d’ouverture et de curiosité envers les personnes d’autres cultures. Cela implique d’adopter une perspective bienveillante et de s’intéresser sincèrement aux différentes valeurs, croyances et pratiques culturelles. En cultivant cette ouverture d’esprit, nous sommes plus à même de reconnaître et de respecter les différences culturelles, ce qui favorise un climat de confiance et de respect mutuel. En faisant preuve d’une écoute active, nous pouvons véritablement comprendre les perspectives et les besoins des autres personnes, d’éviter les malentendus et de créer des liens solides basés sur l’empathie et sur une communication authentique.

Auto-conscience

Le deuxième pilier repose sur une prise de conscience de nos besoins, de nos propres valeurs, biais et croyances et ainsi nous permettre une meilleure compréhension des autres cultures. C’est par la découverte de nos propres préjugés que nous pouvons éviter de projeter nos normes culturelles sur les autres, favorisant ainsi une communication interculturelle inclusive. En comprenant nos propres influences culturelles, nous sommes mieux préparés à naviguer dans les interactions interculturelles en évitant les jugements hâtifs et en favorisant une véritable compréhension mutuelle.

Alliance

Enfin le troisième pilier de cette méthode repose sur la mise en place d’une alliance qui consiste à se mettre d’accord sur des règles communes pour tous les membres du groupe. On définit ainsi une culture propre à la relation dans l’équipe. L’alliance est un engagement mutuel entre les participants, mettant en place des pratiques qui permettent une communication ouverte, claire et harmonieuse tout en respectant et valorisant des différences culturelles et en harmonie avec les objectifs communs. Cela inclut la création d’un espace sécurisé où chacun se sent libre d’exprimer ses idées, ses préoccupations et ses besoins, sans crainte de jugement ou de discrimination, ainsi que l’établissement de mécanismes permettant la résolution efficace des conflits. En effet il ne s’agit pas d’éviter les conflits, au contraire il est indispensable de les mettre à jour et de les résoudre. 

Par exemple, si nous reprenons le cas de la ponctualité, l’alliance devra inclure une règle commune concernant le retard “acceptable” pour une réunion au sein de l’équipe : 5 minutes par exemple. Ainsi, même si certaines personnes continueront d’arriver avant l’heure, elles ne seront plus offensées par quelques minutes de retard des autres membres.

En intégrant ces trois piliers – l’ouverture d’esprit, la prise de conscience et la mise en place d’une alliance relationnelle – dans nos interactions interculturelles, nous sommes en mesure de construire des relations de confiance et non conflictuelles avec des personnes de cultures différentes. Cette méthode offre une approche globale et proactive pour naviguer dans la diversité culturelle et tirer parti des opportunités qu’elle présente.

JEAN-FRANÇOIS LEVY

International Executive and Team Coaching

Jean-François Levy, International Executive Coach certifié ICF de niveau PCC, est spécialisé dans le Leadership Collaboratif. Il accompagne le dirigeant à l'international à "Prendre conscience de ses talents comme tremplin pour son épanouissement personnel et professionnel…"

Franco-mexicain de naissance, il a développé une expertise dans le développement organisationnel des PME et des entreprises familiales au Mexique, où il réside depuis 2000. Auparavant, il a exercé des fonctions de dirigeant au sein de grandes entreprises en Angleterre, en France et au Brésil, puis comme directeur des opérations au sein d'une PME familiale.

Avec plus de 30 ans d’expérience en management interculturel et la maîtrise de la Co-CREATiVE Communication®, il permet aux dirigeants d'exprimer leur style personnel de leadership tout en l’adaptant à la situation culturelle de leur organisation.

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